Cette fois, c'est ma sœur qui vient me chercher. Je me tiens
devant le panneau indiquant l’entrée lorsque je vois sa voiture
vert pomme s’arrêter devant la gare. Je lui souris, monte,
l'embrasse et elle me conduit directement à la salle des fêtes.
À chaque fois, c'est la même chose. Ma sœur entre et les autres
villageois saluent la jeune fille populaire en souriant puis je
rentre et deux questions emplissent la pièce :
1/ comment la cadette du boucher peut-être aussi
différente de sa sœur
2/ qu'est-ce que cet Alien fait ici ?
Mais aujourd'hui, c'est différent. C'est toute ma famille qui
remplit la salle.
Un homme se tient au centre de la pièce un verre de champagne à
la main. Ses cheveux bruns bien coiffés, son costume trois-pièces
cravate beige. Mes yeux font le tour de la pièce : les rubans
roses accrochés aux fenêtres ; les tables blanches ornées de
confettis et dragées ; les spots et amplis trônant sur les
bords de la scène. C'est un mariage et cet homme souriant à la
table d'honneur n'est autre que mon frère.
Les larmes me montent aux yeux.
"Mon frère se marie et
ils m'ont fait la surprise !" Ma belle-sœur vient vers
moi tout sourire
"je suis contente que tu sois-la "
me dit-elle. Je suis tellement émue que j'en tomberais à la
renverse !
C'est alors que -tel Iron man- j'analyse de nouveau la pièce. Les
assiettes sur la table sont à moitié mangées, ce qui veut dire que
j'ai loupé l’Église. J'ai pris mes billets à la dernière
minute, ils ne pouvaient donc pas savoir si je serais là ou pas.
"Oh
mon Dieu, ils ont oublié de m'inviter !»
Les larmes de joies se transforment en larme de colère. Ma
belle-sœur et ma sœur comprennent ce qui vient de se passer et font
signe à ma mère qui arrive immédiatement.
-
"Maman, vous m'avez oublié ?!
-"Bah oui, mais il y a eu une erreur dans les invitations
et puis après..."
-"On se parle toutes les semaines et tu ne m'as rien
dit ?!" Je l'interromps.
-"Je ne savais pas trop quoi dire et après c’était
trop tard "
-"Alors, tu t'es dit que je serais trop bête pour m'en
rendre compte ? Dans quel genre de famille on oublie sa sœur,
sa fille ?! Vous vous moquez de moi ?!"
Ma colère ne désemplit pas, pendant plusieurs minutes mes
hurlements font échos dans tout le village. La haine coule en
moi comme le champagne dans leur sang. Je jauge cette famille qui
ne m'inspire que dégout.
Ma mère n'est pas du genre à lâcher prise. Je sais que rien
ne sert de me battre. Je fait demi-tour, reprends mon sac à dos
dans le coffre et pars. Faites vos adieux à l'Alien braves gens.
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L'escalier est large, mais il est sombre. Ils devraient mettre des
photos de crânes fracturés sur les rampes comme ils
mettent des poumons pourris sur les paquets de cigarettes.
Ma nièce est en haut avec une copine. Elles sont debout devant la
porte à discuter. Dès qu'elle me voit, elle se tait. Même ses
cheveux blonds frisés semblent se figer. Je n'ai pas le temps
d'arriver en haut des marches qu'elle m'interpelle.
-
"Qu'est ce que tu fais là ?» Son ton est dur.
Je ne l'ai jamais entendu parler comme ça. Ça me brise le cœur
qu'elle me haïsse, mais c'est une ado, ça fait partie du jeu.
N’empêche, je ne suis pas du genre à lâcher prise.
-
"Je veux te parler "
-"Pas moi "
-"Je n'ai pas dit que je voulais que tu me parles, tu n'as
qu'à écouter "
-"Je n'en ai pas envie "
-"Je ne
suis pas exactement en train de te demander ton avis.»
-"Tu comptes me forcer à t’écouter ?"
-"Si tu m'y obliges, je t'attacherais oui, mais tu es
assez grande pour comprendre que te débattre serait une perte
d’énergie vu que tu finiras par m’écouter. Autant nous éviter
cette peine".
-"Je t’écoute, mais je me fou de ce que tu dis »
-"Ca tu ne le sais pas encore".
On peut dire que la conversation ne démarre pas très bien et -
même si je ne laisse rien transparaitre - je commençe à avoir
peur que l’opération -élimination de la montagne de dédain -
soit un fiasco.
Alors que je réfléchis à mon accroche, j'entends un craquement.
Je lève les yeux à la rambarde. Je n'ai pas le temps d'atteindre le
palier qu'elle tombe dans la cage. L'amie de ma nièce appuyée
contre elle et aspirée en arrière. Son corps s’écrase plusieurs
mètres plus bas. Ma nièce hurle, mais je ne l'entends pas. Je ne
vois que cette tache de sang qui teint les longs cheveux bruns. Puis
je vois les lèvres contorsionnées. Elles bougent ! Je
redescends les marches quatre par quatre pour arriver jusqu'à la
jeune fille.
-
"Ne la touche pas " hurle ma nièce
-"Fais-moi confiance " je m’insurge
"et
appelle les pompiers au lieu de rester la à rien faire !"
Son corps est tordu, elle a surement la jambe et plusieurs cotes
cassées. Son crâne aussi est fracturé (je vous avais prévenu).
J'arrache un bout de mon t.shirt et applique le tissu sur les
différentes plaies faisant des bandeaux quand c'est possible. Je la
mets en position de sécurité sur le côté. La
jeune fille frêle semble avoir repris ses esprits, je me cale
contre elle en attendant les pompiers. Lorsque je lève les yeux, je
vois ma nièce qui sourit. Sur ses lèvres il me semble lire “Merci”.